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« Data Opt-in-imism : pourquoi la confiance est-elle la clé du succès de l’EHDS », une question débattue au HLTH 2025

23 juin 2025 - 21:23,
Actualité - DSIH, Mehdi Lebranchu

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Le 18 juin dernier, au Salon HLTH Europe d’Amsterdam, la conférence « Data Opt-in-imism: Why trust is key to the success of EHDS » a réuni des voix institutionnelles du nord de l’Europe autour d’une question déterminante pour l’avenir du partage de données de santé : la confiance. Prévu pour 2029, l’Espace européen des données de santé (EHDS) ambitionne de permettre à chaque citoyen européen de partager ses données à des fins de soin, de recherche et d’innovation. Encore faut-il que ce partage repose sur des bases éthiques solides, transparentes et acceptables dans des contextes culturels très contrastés.

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Animée par Thomas Hagemeijer, fondateur du cabinet HGM Advisory, la discussion a très vite posé les termes du débat : l’EHDS n’est pas qu’une infrastructure technique, c’est aussi un écosystème économique. Présenté comme une « marketplace » ouverte à la création de produits et de recherche, le projet soulève immédiatement une tension : comment concilier cette ambition avec l’impératif de confiance citoyenne, indispensable à toute adhésion ?

Malene Fischer, directrice de la recherche au Rigshospitalet de Copenhague, s’est opposée à une lecture trop utilitariste du système. Pour elle, la confiance ne se décrète pas : elle se gagne. Elle repose sur une exigence forte de traçabilité, de clarté dans les usages et de démonstration concrète de la valeur produite. La donnée ne peut pas être perçue comme un bien monétisable sans provoquer, selon elle, un recul immédiat des usagers. À l’inverse, des cas d’usage bien identifiés, notamment dans le champ des maladies rares, permettent de justifier l’adhésion.

C’est aussi la conviction de Jaanika Merilo, en charge de la santé numérique au ministère des Affaires sociales d’Estonie. L’expérience de son pays, souvent cité comme modèle, montre qu’une gouvernance distribuée et transparente favorise l’acceptabilité. En Estonie, chaque citoyen peut savoir précisément qui accède à ses données, dans quel but, et à quel moment. Mais elle rappelle que cette confiance n’est jamais acquise et ne se limite pas à un cadre national. Dans le contexte transfrontalier de l’EHDS, la confiance doit aussi s’étendre aux autres États membres, et c’est là que les disparités se creusent. Tous les pays ne bénéficient pas du même niveau de légitimité institutionnelle auprès de leurs citoyens. Les différences de perception entre des pays comme le Danemark, l’Espagne ou la Lettonie en matière de gestion des données sont flagrantes, et constituent un frein potentiel au consentement mutuel.

Pour Maria Bäcklund Hassel, conseillère senior à l’Agence suédoise de santé numérique, la construction de la confiance passe par la preuve plus que par l’intention. Montrer ce que les données permettent concrètement, dans des projets visibles et utiles, est plus efficace que toute campagne d’explication. Elle met en garde contre une dérive attentiste : le pire scénario pour l’EHDS serait son ajournement, faute de consensus. L’Union européenne, dit-elle, ne peut pas se permettre de rester en retrait sur ce sujet. Face aux puissances que sont les États-Unis ou la Chine, elle doit constituer un bloc cohérent, sans se faire concurrence en interne.

La question de la régulation a naturellement émergé au fil des échanges. Si l’encadrement réglementaire est nécessaire, il peut, à certains égards, ralentir l’innovation. Dans de nombreux pays, les processus d’autorisation ou les règles d’usage de la donnée sont perçus comme lourds, parfois inadaptés aux réalités du terrain. L’Estonie, là encore, se distingue avec des exemples d’équilibre fonctionnels comme la prescription électronique, largement adoptée sans rupture avec les exigences réglementaires européennes. Le défi n’est donc pas de choisir entre régulation et innovation, mais d’articuler les deux dans des cadres opérationnels réalistes.

Les chiffres évoqués en fin de session permettent de mesurer l’écart entre discours et perception réelle. En Estonie, moins de 1 % des citoyens exercent leur droit d’opt-out, preuve d’une confiance installée. En Suède, ce taux oscille entre 1 et 2 %, quand les premières estimations évoquent jusqu’à 10 % à l’échelle européenne. L’ordre de grandeur reste raisonnable, mais il confirme que le modèle opt-in ne peut fonctionner qu’à condition d’être compris, accepté et suivi d’effets concrets.

Plus qu’un débat technique, la conférence a mis en lumière l’enjeu culturel de l’EHDS : bâtir un cadre commun sans effacer les singularités, démontrer les bénéfices sans minimiser les risques, et surtout inscrire durablement la confiance comme pierre angulaire du système.

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