Archivage : où est l’urgence ?

09 mars 2015 - 12:02,
Tribune - Cédric Cartau
Dans le dernier numéro du magazine DSIH, votre dévoué serviteur disserte sur l'un des paradoxes de la technologie informatique (1) : elle produit de plus en plus de données, mais leur stockage est un colosse aux pieds d'argile car rien ne dit que nous pourrons relire nos CD, nos films sur DVD, nos données de santé à l'échelle d'une vie humaine.  

Dans un article récent, Vint Cerf – l'un des pères d'Internet, excusez du peu – s'alarme pour les mêmes causes et évoque l'idée d'un parchemin numérique, en l'occurrence le développement d'une technologie permettant de graver une donnée, structurée ou pas, sur un support à durée de vie infinie.

Récemment, j'ai participé à un groupe de travail sur la question de l'archivage de données de santé à valeur probante, concept qui consiste à stocker une donnée de telle façon à garantir son intégrité par des moyens non contestables, faisant ainsi foi devant un juge en cas de contentieux. Plusieurs sociétés informatiques disposent d'une offre en catalogue, que ce soit des entreprises officiant dans le domaine du stockage ou dans le domaine logiciel, auquel cas l'intégrité de la donnée est garantie par des mécanismes de signature à base de certificats logiciels.

Je suis toujours étonné lorsque ce type de projet est lancé dans un établissement de santé, car il me semble que l'on oublie un élément fondamental dans le débat : l'archivage à valeur probante certes, mais pour quoi faire ? S'il s'agit de se protéger en prévision de contentieux certes, mais alors le lecteur conviendra qu'il est nécessaire d'évaluer le coût du dispositif (très élevé) avec le gain éventuel, à savoir les dommages et intérêt que l'établissement évitera, si tant est qu'il parvienne à les éviter. Or, les procès du genre sont rarissimes en France, et encore plus les montants des condamnations. En termes purement économiques – en existe-t-il d'ailleurs d'autres ? - un projet d'archivage à valeur probante n'a donc aucun intérêt dans un hôpital.

Par contre, l'archivage tout court – sans sa dimension « probante » - est une urgence manifeste : combien de logiciels stoppés, conservés sur des serveurs mêmes virtuels dont personne ne peut garantir qu'on pourra à nouveau les allumer, les lire, les interpréter dans à peine 10 années ? Combien de projets de changement de logiciels patient dans les hôpitaux qui éludent la dimension de la reprise des données ? Combien de dossiers de spécialité qui équipent tel ou tel service depuis 5 ans ou plus, et dont la mort annoncée – l'éditeur n'existe plus, la technologie est obsolète – fait courir un risque de perte ?

Il semblerait qu'avant de se lancer dans ces couteux projets de valeur probante, il faille en revenir aux fondamentaux : quel est le réel besoin ?

[1] L’Alzheimer numérique nous guette

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