« Management de l’innovation et innovation du management » : to be or not to be

12 mars 2024 - 09:46,

Actualité

- DSIH, Par Delphine Guilgot
Le voyage d’étude organisé par le CATEL autour du congrès HIMSS est aussi l’occasion pour les membres de la délégation de partager leurs expériences. Ce lundi 11 mars, il était notamment question de la conduite des projets e-santé au sein des établissements. Avant de partir à la découverte des dernières tendances technologiques, rien de plus pertinent que de reposer les bases. Agilité, conduite du changement, compréhension des besoins, … reste-t-il un acteur du numérique en santé pour penser qu’un projet SI réussi ne tient qu’à sa performance technologique ?

Bruno Liénard, directeur du système d’information du CH EpiCURA en Belgique, s’interroge : « Nous essayons de proposer des systèmes d’information les plus proches possibles des besoins des utilisateurs. Mais je constate immanquablement qu’ils ont malgré tout, des difficultés à bien les utiliser. Est-ce qu’on les accompagne mal ? Sont-ils trop complexes d’accès ? » L’enjeu est de taille. On est encore à la croisée des chemins : d’un côté, des professionnels, soignants et administratifs, habitués à utiliser dans leur quotidien personnel des outils numériques ergonomiques ; de l’autre, de fortes contraintes de sécurité qui empêchent les directions du numérique de proposer des solutions facilement accessibles. La concurrence de solutions telles que Dropbox ou WhatsApp représente un vrai challenge. Comment mobiliser les utilisateurs autour de projets digitaux conformes aux obligatoires sécuritaires et donc souvent un peu plus contraignants ? « Il faut être agile. On ne peut pas dire oui à tout, mais on ne peut pas, non plus, dire non à tout, » concède Bruno Liénard.

Comprendre, auditer, comprendre, auditer, …

Pour Félix Mamoudy, directeur de la transformation et de l’innovation à l’Hôpital américain de Paris, la règle de base est d’aller sur le terrain et de poser les bonnes questions. « Quand un professionnel nous adresse une demande, il est important de s’interroger sur son écosystème. L’exemple du bloc opératoire est particulièrement parlant. La demande du chirurgien ne sera pas celle de l’IBODE, ni de celle de l’anesthésiste. » Il est important de comprendre et de bien connaître les équipes, de favoriser l’intelligence collective et de partager les problématiques. 

Accompagner et impliquer l’ensemble des professionnels

La DSI du CH EpiCURA dispose ainsi d’une équipe de change management dont la mission est de rapprocher l’informatique des métiers. « Cette organisation a permis de développer l’usage de notre dossier médical informatisé en l’espace de 18 mois, » confie Bruno Liénard. La réorganisation du service et l’intégration des personnels liés à la documentation, et notamment les secrétaires médicales, ont également permis d’accélérer le mouvement. Elles sont en effet au cœur de l’information médicale, proches des équipes de soin et orientées patients. Les associer aux équipes SI a permis d’adresser le besoin croissant d’accompagnement IT exprimé par les soignants. 

« On comprend que le défi du changement est relevé quand les idées finissent par remonter du terrain » explique Félix Mamoudy. « Et pour cela, les échanges entre les équipes, au sein de l’équipe, avec la direction, informels pour la plupart, sont primordiaux », continue-t-il. Le CH EpiCURA en est également convaincu et a mis en place un comité Innovation en interne. Doté d’une enveloppe de 100 000 euros, il a permis de lancer un appel à projets auprès des équipes de l’établissement. « Nous comptons sur cette démarche pour améliorer le mode de fonctionnement de l’hôpital » confie son DSI.

Plaidoyer pour le retour du temps long 

« Les organisations recherchent souvent des résultats immédiats, mais les changements profonds nécessitent du temps et des efforts » défend Félix Mamoudy qui, après plus de 4 ans à l’Hôpital américain, aborde tout juste le 2ème niveau de sa stratégie de transformation. « Il faut monter les marches les unes après les autres, et savoir s’arrêter si un projet lancé depuis des années ne fonctionne pas. Les équipes ont le droit de se tromper. On a le droit de se tromper » martèle-t-il. A une condition : avoir contextualiser, auditer, cadrer la demande. « Mettre de la technologie dans des projets sans réorganiser, c’est rajouter du bazar au bazar » prévient-il. Une leçon à retenir, alors qu’aujourd’hui il est devenu rare de monter un projet en santé sans y intégrer plus ou moins de numérique.

Stéphan Haaz, directeur général du CATEL, conclura les échanges en mettant en regard le « Management de l’innovation et l’innovation du management ». Plus que jamais le leadership des pilotes de projets e-santé est challengé. Le métier évolue. Il ne peut plus seulement reposer sur la compétence technique mais requiert des compétences managériales, pédagogiques et une grande force de conviction !

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