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DSI de GHT : le mythe des économies de la convergence

15 juin 2021 - 00:21,
Tribune - Cédric Cartau
Vu l’état général des moyens financiers et humains des DSI d’établissements de santé (1,7 % du budget de l’établissement, moyenne nationale, contre 3,5 % pour atteindre le niveau 6 de Himss qui est l’ambition affichée de tous les plans HNUM depuis 15 ans), à un moment donné on ne peut plus tourner autour du pot, il faut bien nous expliquer où on va trouver les sous. Ça ne rate jamais, il se trouve toujours quelqu’un pour venir vous expliquer que la convergence des SI – et des DSI – va faire réaliser des économies tellement miraculeuses que le jackpot au Loto, à côté, c’est de la gnognotte. Eh bé non. Voici pourquoi.

Globalement, si l’on analyse le fonctionnement d’une DSI selon la norme ABC, il se divise en quatre parties très différentes :

– les terminaux utilisateurs : PC, smartphones, tablettes, avec les logiciels, la hotline, les changements et réparations de matériel, etc. ;
– la gestion de l’infrastructure : salles informatiques, réseaux, serveurs, etc. ;
– la délivrance de progiciels métiers (RH, DPI, etc.) ;
– la gestion de tout le middleware technique, sorte de « colle » logicielle qui permet à tout le bazar de fonctionner sans pour autant relever des trois catégories précédentes : l’AD, les DNS et DHCP, les sauvegardes, etc.
(La quatrième famille pourrait être fusionnée avec la deuxième mais, pour les besoins de l’article, je dois les distinguer.)

Pour la première famille (les terminaux), il y a peu d’économies d’échelle à réaliser : il y a longtemps que les hôpitaux ont massifié les achats sur le plan national, les prix unitaires des matériels et des prestations ont été lissés à la baisse et, de plus, le coût de gestion est directement lié à la taille du parc : deux établissements de 5 000 PC chacun ne gagneront pas grand-chose à mutualiser les équipes (ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas le faire, mais pour d’autres raisons).

Pour la deuxième famille (l’infrastructure matérielle), oui, clairement, des gains sont à attendre, mais il faut les prendre avec précaution : exploiter une salle informatique coûte cher, tout le monde a intérêt à les regrouper. Sauf que cette consolidation ne peut se faire sans une appréciation pointue de l’évolution de la matrice des risques, et l’on s’aperçoit que les questions de PCA-PRA (qui doivent être maintenant gérées à l’échelle du GHT et non plus de l’établissement support) ajoutées à celle du dédoublement des liens télécom sur le territoire (bonjour la facture) font que l’équation financière, si elle reste positive, ne l’est pas autant qu’à la première estimation effectuée sur un coin de table.

Pour la troisième famille (la délivrance de progiciels métiers), c’est certainement celle pour laquelle sont racontées les pires bêtises. Pour ceux qui ne connaissent pas cette partie de l’histoire des SI hospitaliers, je signale que les pouvoirs publics ont supprimé il y a 20 ans les Crih (Centres régionaux d’informatique hospitalière, qui faisaient déjà – eh oui – de la mutualisation des SI à l’échelon régional), entre autres (il y a plusieurs raisons) parce qu’à l’époque mettre à disposition le même logiciel RH, la même GAM, la même GEF pour un CHU et pour un établissement SSR de 200 lits s’est terminé par un échec. Plus près de nous, on a le célèbre logiciel unifié de gestion de la paie des militaires (le fameux « Louvois »), projet lancé en 1996 et qui ne fonctionne toujours pas en 2021 après trois versions cataclysmiques et autant d’audits et de rapports internes. Bref, non seulement rien ne dit que la convergence SI soit faisable, mais encore moins qu’elle permette de réaliser des économies : certes il n’y aura plus qu’un seul progiciel, mais quand il fallait quelques heures à un informaticien local pour assister les utilisateurs d’un petit établissement périphérique avec un logiciel « simple », combien de temps faudra-t-il au même bonhomme avec un progiciel monstrueux (imposé par l’établissement support) ? Le coût d’un progiciel est directement lié à sa complexité qui se mesure en points de fonctions : plus ils sont nombreux, et plus c’est cher. Tout laisse à penser qu’un DPI unique générera une augmentation des coûts pour la DSI. Par contre, indiscutablement, il en résultera des économies pour les professionnels de santé, qui visualiseront les données d’une filière médicale au sein d’un progiciel unique, et c’est tant mieux pour eux. Somme toute, dans le cas précis d’un DPI de territoire, les professionnels métiers vont économiser des ressources, mais les DSI vont accroître leurs budgets, ce qui est d’ailleurs tout à fait logique. Donc, d’économies DSI point à l’horizon sur cette catégorie, avec même le risque de coûter plus cher.

Pour la quatrième famille, les avis sont partagés. Certes, passer de cinq AD à un seul fait mécaniquement baisser les coûts. Sauf que le niveau de sécurité exigé pour l’AD unique est sans commune mesure avec celui des cinq précédents pris isolément – sans parler du fait que sur les cinq AD initiaux, l’état de sécurité de certains pouvait friser la correctionnelle.

Le sujet est très complexe (rien que pour le volet des progiciels métiers, il faudrait bien plus que 4 500 signes), d’autant que, dans certains cas, la configuration du GHT (un gros établissement accolé à plusieurs tout petits, versus des établissements de taille comparable) rend certains éléments du présent article discutables ou totalement applicables. Pour certains progiciels totalement réglementés (RH, achats) le sujet n’est pas le même que pour d’autres qui informatisent des fonctions plus complexes (le soin). Mais, ce qui est certain, c’est que les poncifs à l’emporte-pièce du genre « fusionner les DSI permet de faire des économies sur le budget SI » ont autant de valeur que les opinions du café du village sur la géopolitique des Tigres tamouls.

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