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Le destin de l’hôpital : banalisation, ’’coopétition’’, fusion
Qu’on en juge par la succession des textes : la loi du 31 juillet 1991 sur la planification hospitalière, l’ordonnance du 24 avril 1996 qui réforme l’hospitalisation privée et publique, la loi du 4 mars 2002 qui marque la volonté de créer une démocratie sanitaire, l’ordonnance du 4 septembre 2003 qui simplifie l’organisation et le fonctionnement du système de santé, l’ordonnance du 2 mai 2005 qui simplifie le régime juridique des établissements de santé, le plan Hôpital 2007, la loi du 21 juillet 2009 qui notamment simplifie les catégories d’établissements, crée une liste limitative de missions de service public, et réorganise la gouvernance des établissements publics de santé, la loi du 10 août 2011 qui favorise des coopérations professionnelles, le plan Hôpital 2012, et la loi du 26 janvier 2016 qui crée les fameux GHT.
Mais la simplification n’est pas finie. Elle va se poursuivre dans le cadre de la stratégie de transformation du système de santé (#Masante2022).
Trois mouvements (au moins) semblent d’ores et déjà se dessiner : la banalisation, la ’’coopétition’’ et la fusion
Banalisation d’abord parce que, par la volonté du législateur, l’hôpital public a perdu sa spécificité au profit d’un grand droit commun de l’hospitalisation : même planification, mêmes autorisations, quasiment même CPOM, mêmes outils de coopérations. Et même le régime financier, c’est-à-dire la T2A, devient en majeure partie commun aux établissements MCO.
Le principe de spécialité des établissements publics de santé ne fait plus obstacle à la prise en charge d’une activité concurrentielle. Dorénavant, par exemple, un centre hospitalier a le droit de se porter candidat à un marché public de blanchisserie, initié par un autre centre hospitalier, à la condition toutefois que le candidat prenne en charge cette activité à moyens constants (CAA Nancy, 10 avril 2018, n°17NC00165).
Avec l’instauration en 2005 de la T2A, les chambres régionales des comptes contrôlent désormais la performance des hôpitaux publics qui est devenue un déterminant décisif de leur équilibre financier. Ces derniers se voient soumis aux mêmes logiques économiques et financières que n’importe quel groupe de cliniques privées.
« Coopétition » (concept introduit dans les années 1990 et objet de travaux de recherche en management stratégique) ensuite parce que, sur un territoire donné, les établissements de santé se trouvent à la fois en situation de concurrence et de coopération : en somme, des acteurs concurrents se rapprochent pour travailler ensemble.
La coopération correspond, en pratique, à une nécessité de travailler dans un esprit de mutualisation, de complémentarité et de proximité. Sur le terrain, les coopérations sont nombreuses et fructueuses. Ainsi, et par exemple, s’agissant du cancer, un GCS devrait réunir en 2019, les trois CHU de Nouvelle Aquitaine et l’institut Bergonié. Certains GHT créent un GCS pour mutualiser le financement de leurs investissements (ex : GHT Léman-Mont Blanc).
La concurrence, quant à elle, incite les établissements à proposer des activités de qualité suffisante de manière à être connus, reconnus et donc prescrits. Ce n’est pas un hasard si les palmarès régulièrement édités par la presse réalisent les meilleurs chiffres de vente, puisque ces classements répondent à une demande forte des consommateurs. À quand un palmarès des systèmes d’information de santé, d’ailleurs ?
Attention cependant à l’impact fiscal de la concurrence ! En effet, sont présumées ne pas entrer en concurrence avec les organismes privés, les hôpitaux publics réalisant des activités d’hospitalisation et de soins médicaux pour lesquels les établissements de soins privés bénéficient d’une exonération de TVA. Dans le cas contraire, les hôpitaux publics entrent nécessairement en concurrence et doivent par conséquent être soumis à la taxe (Cf. doctrine administrative du 4 février 2015).
On ne peut pas gagner sur tous les plans.
Fusion enfin pour les raisons déjà évoquées dans un précédent filet. Les groupements hospitaliers de territoire ne pourront rester en l’état et ils devront, à court terme, aboutir à une seule entité juridique, de gré ou de force. C’est en tout cas la trajectoire « proposée » par les Pouvoirs publics.
À la lecture du dernier rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale (Cf. l’excellent édito de Finances Hospitalières de novembre 2018), les établissements pourront au moins se réjouir d’avoir contribué au redressement des comptes sociaux…mais au détriment de l’équilibre de leurs propres comptes, donc au détriment du patient (que nous sommes tous, en définitive).
Par Me Emmanuelle Peletingeas et Me Omar Yahia
Avocats co-fondateurs de YAHIA Avocats
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