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Le RGPD et l’autoréflexivité des SI

23 jan. 2018 - 10:10,
Tribune - Cédric Cartau
Ce qui frappe quand on étudie l’histoire des idées dans une discipline telle que les mathématiques, c’est ce qui s’est passé tout au début du xxe siècle. Pendant plus de deux millénaires, les matheux ont étudié des objets (la géométrie, les nombres, les équations) en essayant d’en dégager des lois, des théorèmes ou des propriétés. Au xxe siècle, une frange des mathématiciens (les logiciens) s’est mise à étudier comme objet… les mathématiques elles-mêmes, et a prouvé des théorèmes étonnants, comme les champs qu’il serait à jamais impossible d’investiguer(1).    

Ce passage de l’objet au « méta » est en train de se produire dans les DPI, et plus généralement dans les progiciels métiers. Dans ce domaine, le monde de la santé dispose d’une offre assez fournie pour informatiser les processus de l’hôpital : le soin, mais aussi les finances, les RH, etc. Ces progiciels supposent de mettre en place des procédures de collecte, de traitement, de restitution et d’analyse des données fournies, rien que de très habituel.

Mais il est possible de pousser un cran plus loin. Par exemple, il est tout à fait envisageable – et certains éditeurs de DPI le proposent dans leurs catalogues de modules ou d’options – de mettre en place des fonctions d’analyse des processus, eux-mêmes informatisés. Par exemple, le DPI contient les données médicales des patients, mais aussi leur affectation administrative ou géographique, qui les a pris en charge, à quelle heure, etc. Dans des secteurs à flux tendu comme les urgences, le Samu, les unités de soins intensifs, pourquoi ne pas analyser les données contenues en base pour analyser les flux logistiques de prise en charge ? On n’est pas sur le soin pur, mais bien sur les pratiques métiers, qui relèvent davantage de la logistique de traitement. Certains éditeurs de progiciels de gestion des urgences ont été pionniers en la matière. Dès lors que ces pratiques n’ont pour seul but que de gérer des flux physiques, en tant que CIL/DPO je n’y vois personnellement aucun inconvénient, bien au contraire.

Là où cela commence à poser question, c’est quand on extrait de la base des données à caractère médical afin de sortir de beaux camemberts en couleurs : combien de patients avec tel type de pathologie sont arrivés dans le service le mois dernier, quelles tendances se dégagent mois par mois depuis le début de l’année, etc. Bien entendu, si ces éléments relèvent plus de la santé publique que du soin pur, personne ne niera qu’ils participent, même indirectement à la prise en charge des patients. Là où je tique, c’est quand les outils décisionnels permettent, par simple clic de souris sur le camembert en question (qui ne contient que des données agrégées), de descendre à la liste des patients : quelles sont les habilitations d’accès à ces listes, et surtout quelle est la traçabilité d’accès à ces données ? Il ne faudrait pas disposer, d’une part, d’un DPI avec une politique d’habilitation tirée au cordeau et, juste à côté, d’un outil décisionnel ouvert à tous les vents. 

Et là où cela pose encore plus question, c’est quand les mêmes données en base sont utilisées, non pas pour analyser les données des patients, mais l’usage qui en est fait par tel ou tel utilisateur, qu’il soit du corps médical ou du corps soignant. Certes, on m’explique que détecter le temps moyen passé par un praticien sur un dossier va permettre de détecter ceux qui l’utilisent mal, à savoir ceux qui pourraient avoir besoin d’un complément de formation ou d’accompagnement, mais chacun voit rapidement le piège insidieux qui risque de transformer une aide à l’utilisation en flicage sur le temps de travail, la rentabilité, etc.

Le RGPD arrive à point nommé dans ce contexte puisqu’il va permettre de revenir aux fondamentaux : on ne fait pas n’importe quoi avec des données, fussent-elles des métadonnées sur le système, du moment qu’elles sont imputables à des individus.


(1) Cf. les théorèmes d’incomplétude de Gödel.

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