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Informatique de santé, j’ai honte…

27 déc. 2016 - 01:00,

Tribune

- CBO
             

Cette semaine, j’ai participé à une réunion concernant un de ces multiples « petits » progiciels qui se multiplient, au fil des ans, dans nos établissements de santé. Il s’agit d’un outil qui permet de recueillir des informations sur des patients traités en cardiologie, et qui sert essentiellement à collecter des données pour les envoyer vers une base européenne de type observatoire. Cette base européenne fournit des analyses précises et précieuses aux praticiens de tous les pays adhérents sur la typologie des patients, la morbidité, l’analyse des meilleures pratiques, etc. On n’est pas dans un protocole de recherche, on n’est pas exactement dans la constitution d’une cohorte, mais cela va clairement au-delà de la simple prise en charge de terrain immédiate.

Et là, cela me fait mal d’écrire ce qui suit, mais je suis ressorti de cette réunion avec la sale impression d’avoir laissé le demandeur au milieu de son bourbier quotidien : alors que l’informatique devrait l’aider et ne lui apporter que du plus et très peu de contraintes, l’outil avec lequel il travaille relève presque d’un assemblage de bout de ficelles. Certes, les données collectées sont justes et les analyses pertinentes (le moteur d’analyse du progiciel est manifestement de haut niveau), mais combien de tâches techniques sont demandées à cet anesthésiste, indignes de lui et surtout réclamant un temps précieux : export de données XML, chiffrement à la main avant envoi, requêtes SQL codées par l’utilisateur lui-même (véridique), bidouillage dans des fichiers textes, etc.

Et à aucun moment cet anesthésiste ne s’est plaint ni a tenté d’argumenter sur les contraintes juridiques ou le manque de temps de la DSI qui l’oblige à pondre lui-même ses requêtes SELECT. On lui demande de chiffrer à la main avant envoi, oui pas de problème, il le fera ; on lui demande de patienter des mois avant de lui envoyer un informaticien pour l’aider à écrire ses requêtes les plus complexes, oui il comprend ; on lui demande de recoder à la main les identifiants patients, oui il est d’accord. Je tairai le nom de cet anesthésiste ; qu’il vous suffise de savoir que son professionnalisme et sa gentillesse le classent pour l’éternité dans la catégorie de ceux pour qui on a envie de se mettre en quatre. L’immense majorité des praticiens que je côtoie à longueur de journée et de couloirs dans mon CHU est comme cet anesthésiste, à se débattre avec des difficultés informatiques d’un autre temps, et le prenant avec philosophie.

Le point commun entre l’informatique de santé et l’URSS des années 1950 ? On sait envoyer des types dans l’espace, mais il n’y a pas de pain dans les boulangeries.

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