Publicité en cours de chargement...

Publicité en cours de chargement...

Blockchain : là, je ne vois vraiment pas

13 déc. 2016 - 09:59,
Tribune - Cédric Cartau
Il y a certainement un moment, dans la carrière de chacun, où nous passons de la position de visionnaire à celle de has been, et en général les signes annonciateurs sont sans équivoque : une avancée technologique dont on ne parvient pas à percevoir l’intérêt, malgré les bêlements à l’unisson de la presse spécialisée. C’est certainement ce qui doit être en train de m’arriver, car là, je dois le reconnaître : les Blockchains, je ne vois pas bien ce que nous allons en faire dans le monde de la santé (cette dernière précision étant importante, car dans le domaine des cryptomonnaies, il n’y a pas débat).

Les contraintes de place m’empêchent de rappeler le fonctionnement de ce dispositif, mais le lecteur trouvera ici[1] un rappel des principes. Le site en question note l’engouement général pour cette technologie, pour laquelle pas moins de 1 600 articles auraient été consacrés dans la presse ces derniers mois. Dans le monde de la santé également, plusieurs publications (ici[2], là[3] ou dans l’excellent article du Dr Cécile Monteil du numéro 18 de DSIH), mais qui tournent toutes plus ou moins autour de trois exemples : la traçabilité de l’accès aux données de recherche clinique, la traçabilité d’accès au DMP (pour autant que ce grand machin ne meure pas avant la fin de l’année) et la traçabilité des médicaments.

Et c’est bien là que je bloque, car la technologie de Blockchain offre des caractéristiques (intégrité garantie des transactions par décentralisation du calcul des preuves numériques et journal public des transactions) qui ne répondent tout simplement à aucun besoin du domaine. Prenons un exemple : dans le domaine du Bitcoin, les transactions (qui achète et qui vend) sont publiques et les traces de ces transactions (le journal) aussi. Dans le domaine de la santé, la donnée est par nature confidentielle, et à ma connaissance il n’existe aucun texte qui impose de rendre publique l’information selon laquelle le médecin X a consulté le dossier médical du patient Y (le DMP pose des contraintes additionnelles sur ce sujet, qui vont au-delà des contraintes des DPI locaux, mais sans aller jusqu’à l’absence totale de confidentialité des traces d’accès).

Dans le domaine de la recherche médicale, lorsque l’on pratique un tant soit peu les protocoles de recherche clinique imposés par les textes et les laboratoires, on sait que la constitution des cohortes, le recueil du consentement des patients, etc. obéissent à des contraintes qui sont tout simplement hors champ des technologies de Blockchain. À titre d’exemple d’ailleurs, la dernière affaire sur ce sujet (décès de patients dans un organisme privé de recherche, affaire en cours d’instruction à ce jour) n’aurait d’ailleurs absolument pas été évitée par ces technologies.

Dans le domaine du médicament, c’est encore plus flagrant : non seulement les contraintes de traçabilité existantes sont parfaitement satisfaites par les systèmes actuels (rappelons tout de même que le monde de l’industrie automobile gère la traçabilité des composants des véhicules depuis plus de 20 ans sans Blockchain et que cela fonctionne très bien), mais – pire encore – de tous les scandales sanitaires en France depuis 30 ans (sang contaminé, amiante, prothèses PIP, Mediator, etc.), aucun, absolument aucun, n’aurait été évité par la mise en place d’une technologie de Blockchain, tout simplement car la fraude a presque toujours été déclenchée avant l’entrée dans le système de traçabilité du composant (prothèses PIP) ou a été commise en toute connaissance de cause (sang contaminé).

Non, là vraiment, les Blockchains je ne vois pas. Cela étant, les travaux avancent, et il ne faut pas rester figé sur une seule position, et même si pour l’instant on ne voit pas trop les use cases, je suis tout à fait prêt à changer d’avis…


[1]   https://blockchainfrance.net/decouvrir-la-blockchain/c-est-quoi-la-blockchain/ 

[2]   https://blockchainfrance.net/2015/09/28/blockchain_sante/ 

[3]   http://www.huffingtonpost.fr/david-manset/big-data-sante-blockchain/?utm_hp_ref=fr 

Avez-vous apprécié ce contenu ?

A lire également.

Illustration Un guide pratique qui simplifie tout (vraiment!)

Un guide pratique qui simplifie tout (vraiment!)

29 avril 2025 - 11:12,

Communiqué

- Collectif SI MS Bretagne

Le Collectif Système d’Information Médico-Social de Bretagne dévoile son guide pratique du numérique pour les structures sociales et médico-sociales.

Illustration Les SI de santé : c’est tout de même assez dingue en 2025 que…

Les SI de santé : c’est tout de même assez dingue en 2025 que…

28 avril 2025 - 21:51,

Tribune

-
Cédric Cartau

Forcément, dans la cyber on voit passer quasiment tous les projets IT d’une organisation : en principe, ils doivent tous suivre une étape d’homologation, sans parler de ceux qui mettent en œuvre des traitements RGPD enclenchant mécaniquement et a minima une inscription à un registre interne.

Illustration Ouverture des appels à projets d’ESMS numérique

Ouverture des appels à projets d’ESMS numérique

28 avril 2025 - 21:34,

Actualité

- DSIH, Damien Dubois

En cours de généralisation, le programme ESMS numérique a fait l’objet d’une instruction ministérielle le 16 avril portant sur les appels à projets régionaux et nationaux.

Illustration Les outils numériques sont-ils réellement adaptés aux patients ayant plusieurs maladies chroniques ?

Les outils numériques sont-ils réellement adaptés aux patients ayant plusieurs maladies chroniques ?

28 avril 2025 - 11:08,

Communiqué

- AP-HP

Les applications numériques en santé sont conçues pour surveiller, traiter et accompagner les patients, mais elles ne tiennent souvent pas compte de ceux atteints de plusieurs maladies chroniques. Une étude, menée par le Pr Viet-Thi Tran (Université Paris Cité / AP-HP) et Ngan Thi Thuy Phi (Universi...

Lettre d'information.

Ne manquez rien de la e-santé et des systèmes d’informations hospitaliers !

Inscrivez-vous à notre lettre d’information hebdomadaire.