La Haute Autorité de Santé présente un plan d’action pour l’innovation thérapeutique

04 fév. 2020 - 10:32,
Tribune - Me Noémie Mandin-Lafond
Durant ces deux dernières décennies, 2 000 essais cliniques ont été réalisés dans le domaine des thérapies géniques et cellulaires, et plus de 20 nouvelles thérapies devraient arriver sur le marché en 2020-2021, bénéficiant d’autorisations de mise sur le marché très précoces, principalement en oncologie, hématologie, neurologie et ophtalmologie.

« Ce sont de véritables innovations de rupture qui vont venir en nombre avec une richesse assez étonnante, en particulier dans des domaines un peu privilégiés comme la cancérologie ou les maladies rares », a récemment souligné devant la presse le Professeur Dominique Le Guludec, présidente de la Haute Autorité de Santé (HAS). 

L’enjeu est donc de taille pour la HAS, dont le rôle est à la fois de « favoriser l’accès des patients à (ces) innovations », mais aussi d’évaluer ces produits novateurs afin de « s’assurer que les promesses sont effectivement tenues ». 

Pour ce faire, la HAS a publié le 27 janvier dernier un plan d’action, composé de 6 mesures, détaillées ci-après, dont l’objectif est d’ « anticiper, accélérer et accompagner le déploiement d’innovations utiles et sécurisés au service du patient ».

 1-     Rendre des avis conditionnels, le temps de lever les incertitudes 

La HAS ouvre tout d’abord la possibilité d’accorder une prise en charge dérogatoire à certains produits de santé innovants, dans l’attente de données nouvelles sous trois ans maximum (délai nécessaire pour lever les incertitudes initiales), en formulant des avis conditionnels.

 2-     Suivre les médicaments en vie réelle pour vérifier les promesses initiales 

La HAS recommande également un suivi très étroit des nouveaux produits qui arrivent sur le marché, et met l’accent sur le nécessaire recueil de nouvelles données, notamment « des données d’utilisation en vie réelle », afin de « collecter les premières données d’utilisation de ces médicaments (données d’usage, de tolérance ou d’efficacité) (…) pour tous les patients qui en ont besoin ».

Ce recueil est aujourd’hui non efficient : les données sont rarement déposées par les industriels au moment de l’évaluation par la HAS d’une prise en charge.

3-     Renforcer l’agilité de la HAS pour mieux accompagner l’innovation

La troisième mesure du plan d’action consiste à :

  •  « renforcer l’agilité » des services de la HAS, en leur permettant de « se concentrer sur des évaluations à forte valeur ajoutée »c’est-à-dire l’évaluation des nouveaux médicaments et leur réévaluation à court terme. La HAS propose à ce titre l’arrêt des réévaluations systématiques tous les 5 ans de médicaments connus qui ne soulèvent aucun problème d’efficacité, de tolérance ou de place dans la stratégie thérapeutique.
  •  « réaliser des rencontres précoces » avec des entreprises qui développent des médicaments pour les aider à concevoir des essais cliniques pertinents ;
  • promouvoir des procédures d’évaluation accélérées (dites de « fast-tracking »). Ce sont des modalités d’évaluation anticipées qui permettent de démarrer l’évaluation d’un médicament au plus tôt, afin de permettre à tous les patients d’y accéder plus rapidement ;
  • engager la HAS dans plusieurs mesures opérationnelles en faveur de l’innovation.

 4-     Impliquer systématiquement les patients et usagers 

La prise en compte de l’avis des patients dans le cadre de l’évaluation des nouveaux produits de santé, a toujours été une volonté forte de la HAS. Aujourd’hui, celle-ci souhaite renforcer cette implication, plus en amont, en associant les patients aux rencontres précoces avec les industriels. 

5-     Renforcer la transparence 

La cinquième mesure vise à renforcer la transparence de la HAS sur ses délais d’évaluation, d’une part, et sur la publication de ses études, d’autre part, et ce, afin de permettre « à tous les acteurs de prendre connaissance des données nécessaires pour une évaluation de qualité ».

6-     Renforcer la coopération européenne pour mutualiser les savoirs

La HAS envisage enfin de renforcer la transparence européenne pour mutualiser les savoirs.

Pour conclure, il serait particulièrement intéressant d’observer, si dans les prochaines années, la HAS a pu assurer un meilleur suivi des médicaments innovants, et gagner en agilité dans ses modes d’évaluation. La problématique est importante, d’autant que les prix revendiqués par les laboratoires sont très élevés et toujours en hausse, ce qui pose la question de la soutenabilité financière de leur prise en charge.


 L'auteure 

Me Noémie Mandin-Lafond
Selarl Yahia Avocats
[email protected]  

Avez-vous apprécié ce contenu ?

A lire également.

Le moment Spoutnik de la cyber

24 nov. 2025 - 22:22,

Tribune

-
Cédric Cartau

En matière d’armement, on dit que ce qui compte vraiment, c’est le nombre et la force. Mais surtout la force.

Illustration BRISS : Transformer la crise hospitalière en levier de résilience

BRISS : Transformer la crise hospitalière en levier de résilience

18 nov. 2025 - 09:35,

Actualité

- Rédaction, DSIH

La plateforme BRISS, portée par l'ARS et la FHF Bourgogne-Franche-Comté, révolutionne la formation des établissements de santé en France en proposant des séries immersives inspirées de crises réelles comme la cyberattaque du CH de Pontarlier en octobre 2025.

Digressions sur la cyber et les enjeux climatiques

17 nov. 2025 - 20:53,

Tribune

-
Cédric Cartau

Cela nous pendait au nez : l’époque est aux questions semi-existentielles sur les enjeux climatiques, et la cyber, longtemps restée à l’écart, voit le sujet arriver par différentes sources et sous différentes formes, dont l’amendement sur les enjeux climatiques de la 27001.

Illustration Santé et cybersécurité : à la Journée SSI Santé, Judith Nicogossian rappelle que la résilience commence par l’humain

Santé et cybersécurité : à la Journée SSI Santé, Judith Nicogossian rappelle que la résilience commence par l’humain

17 nov. 2025 - 15:08,

Actualité

- Rédaction, DSIH

C’est lors de la conférence de clôture de la Journée SSI Santé organisée par l’APSSIS, le 13 novembre 2025, que Judith Nicogossian, anthropobiologiste et spécialiste des interactions humain-technologie, a livré un message sans détour : dans les établissements de santé, la cybersécurité ne peut plus ...

Lettre d'information.

Ne manquez rien de la e-santé et des systèmes d’informations hospitaliers !

Inscrivez-vous à notre lettre d’information hebdomadaire.